Voir vieillir ses parents

Voir vieillir ses parents

 Se représenter ses parents vieillir, c’est se représenter leur mort. C’est aussi se voir soi-même grandir et vieillir. En somme, chacun prend un coup de vieux. Souvent, ces pensées surviennent lorsqu’on passe l’étape importante de sa vie : lorsque l’on quitte le domicile familial, pour alors prendre son envol.

Ces pensées commenceront cependant leurs apparitions au moment où, à l’adolescence l’on essaie d’affirmer sa personnalité. Cela se traduit par les fameux conflits entre générations : « mes parents sont des vieux, il ne comprennent rien ».

Cependant tout le monde ne vit pas le vieillissement de ses parents tranquillement (ou tout du moins « classiquement »); ainsi, certains enfants, s’apercevant que leurs parents se rapprochent inexorablement d’une forme de perte d’autonomie, que leurs parents ont perdu l’énergie qu’ils avaient avant, et que leurs parents se rapprochent de la mort, refusent inconsciemment cet état de fait.

Ainsi, certains enfants, au lieu de vivre ce qu’ils ont à vivre, « vivent la vie de leur parents » : c’est alors que l’enfant, dévoué à ses anciens, jouera « l’infirmier » de sa mère, de son père voire des deux, oubliant lui-même, parfois, ses propres obligations familiales (« j’ai un couple, je suis parent »). C’est alors que l’enfant devient le parent de ses parents.

L’ordre générationnel est bouleversé, chacun n’est plus à sa place.

Que cela peut-il produire ? Des parents peuvent se retrouver infantilisés par leurs propres enfants, où finalement ces derniers ne respectent plus les désirs, les volontés de leurs aînés.

Ainsi les enfants savent mieux que leurs propres parents ce qui est mieux pour eux. Ils peuvent envahir le territoire des anciens, presque jusqu’à l’étouffement.

A La Réunion (comme dans d’autres régions cela dit), la culture s’y prête facilement : certaines familles vivent à lusieurs générations sur le même terrain. Quasiment aucune intimité, les uns se considèrent ainsi chez eux lorsqu’ils sont chez les autres.

Il faut noter que ce fonctionnement est déjà, créé par les parents. Ces parents qui veulent réunir tous leurs enfants sur le même terrain, afin d’en avoir quelque part, une vue d’ensemble (avec l’envie, pourtant impossible à satisfaire, que tous les enfants s’aiment), mais aussi pour en avoir le contrôle. Ainsi, le bouleversement générationnel pourra s’en retrouver favorisé par cet aspect géographique.

Cependant, je ne dis pas qu’il ne faut pas aider ses parents ; c’est après-tout un juste « retour d’ascenseur » pour des personnes, qui, a priori vous ont aimé et choyé.

Mais vous n’êtes pas dans la « dette » vis-à-vis d’eux ; quelque part vous ne devez « rien » à vos parents. Le « devoir » impose une obligation.

Voir vieillir ses parents 1

Vous ne devez pas être dans l’obligation. Vos parents vous ont élevé. C’étaient bien à eux de vous assumer. C’était leur « job ». A vous maintenant de faire aussi bien, ou mieux avec vos propres enfants. Faites à votre tour, votre « boulot ».

Vous ne devez pas culpabiliser à ne pas être toujours là pour vous vos parents. Déjà parce que tout faire à leur place, c’est les rendre encore plus handicapés, les rendre encore plus dépendants d’autrui. Et parce qu’il n’ont pas nécessairement besoin de vous (ils n’osent pas demander ? Pas si certain…Ils n’ont peut-être rien à demander tout court !).

Et qu’enfin il existe des moyens (structures d’aides à domiciles par exemple) pour que vos parents puissent « se passer de vous ».

Seulement, voir ses parents vieillir, créé de notre part, nous enfants, une nostalgie. Une nostalgie de ce qu’on a vécu avec eux, enfants. Il ne faut pas vivre dans le passé. Sinon, c’est s’empêcher de vivre le présent (et donc de créer un autre passé) tout en s’empêchant de construire un futur. N’importe quel parent aimant (celui qui aime ses enfants pour ce qu’ils sont, pas celui qui s’aime à travers ses enfants et qui donc, va imposé à ses enfants ses propres décisions) voudra que ses enfants vivent avant tout pour eux-mêmes.

Car le parent qui bien entendu vieillit, sait que la vie est courte, et que la vie nous n’en n’avons qu’une seule.

Il faut aussi pardonner à ses parents de ne pas avoir été parfaits pendant notre enfance ; on ne peut rattraper le temps perdu, inutile de courir après !

Mieux vaut se concentrer à vivre dans l’instant présent, suffisamment de moments intenses pour compenser ceux du passé. Il faut aussi se dire qu’on ne sera jamais comme nos propres parents, qu’on fera nécessairement différemment. Par ailleurs, l’on est pas non-plus sur terre pour entretenir la mémoire des parents : vos parents ne doivent pas être vos « dieux ». Certes, les respecter comme n’importe quels ancêtres, mais pas plus.

Pour pouvoir accepter de voir vieillir ses parents il faut accepter que la mort (naturelle en particulier), fait partie de la vie. Les croyants pourront toujours penser qu’ils retrouveront, quand ce sera leur tour, leurs parents au paradis. Et pourquoi pas !

Les autres, pourront penser qu’à travers leurs petits-enfants, à travers les valeurs et la mémoire familiale, transmises de génération en génération, leurs parents « vivront éternellement ».

Article publié dans « Belle », supplément du « Quotidien », Ile de la Réunion

GOULOIS David, psychologue clinicien 974 -psychothérapeute 974, sexologue 974 consultations au cabinet à St Pierre tel: 0693917865.

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