Quand les enfants ont peur des parents :

Quand les enfants ont peur des parents :

La relation parents-enfants doit se construire sur le respect mutuel.

Ce respect n’est pas si simple à obtenir. Il s’obtient non par la crainte, mais par la confiance et surtout par l’admiration. Mais alors comment susciter l’admiration chez son enfant ?

Déjà, en passant du temps avec. Lui montrer qu’on sait des choses sur le monde est la meilleur façon de faire pétiller les yeux de son gamin.

Deuxième méthode, faire des trucs ensemble.

C’est quoi des « trucs » ? Partie de pêche pour essayer d’attraper une baleine, shopping mère-fille sans papa et junior qui soupir d’ennui, château de sable éphémère avec pont-levis en coquillage, construction d’un avion en papier avec tirs lasers incorporés…

Bref il y a bien des façons d’impressionner son enfant.

A titre d’exemple, en ce moment j’impressionne mon fils sur des jeux vidéo de destruction de vaisseaux spatiaux intergalactiques. Jeux téléchargés gratuitement sur le net… 

Il n’arrive pas à passer certains niveau, alors papa arrive à la rescousse.

« Il est fort papa ».

Bref, mon gamin est moi c’est tout de même une relation de complicité. Ce n’est pas venu du jour au lendemain, c’est une relation basée sur le temps, sur la communication. Pas besoin d’être psy pour mettre ça en place. Suffit de le vouloir, et d’écouter quand marmaille s’exprime. Il puis, faut savoir se remettre en question, mettre de temps en temps sa fierté de côté et se mettre à la portée du plus petit.

Cependant, l’on peut procéder autrement.

Certains parents estiment que donner le toit et le manger suffisent à l’épanouissement du gamin. Bref, je peux dire que ces parents-là, sont a côté de la plaque.

A conserver cette attitude avec son enfant, l’on finit par ne rien connaitre de lui. Et réciproquement…Alors il ne faut pas s’étonner qu’une fois majeur ou presque, l’enfant ne fasse plus « un cas » avec ses « géniteurs » car dire régulièrement à son gosse qu’on l’aime et passer du temps avec lui, est pour certains adultes, très difficile. Certains n’y ont même pas pensé…

Si j’emploie le mot « géniteur » ce n’est pas pour rien. Donner ses chromosomes, n’est pas en soit très compliqué. Envoyer balader ou n’écouter qu’a moitié l’enfant, à chaque fois qu’il vient demander quelque chose ; lui coller une gifle lorsqu’il a fait une bêtise plutôt que de lui expliquer ce pourquoi il ne fallait pas le faire…C’est souvent sur le coup, plus simple. Enfin pour l’adulte. Mais après, cela devient toujours très compliqué dans la famille.

Tout ce paie un jour.

Donc chez certaines familles, c’est comme ça que l’on procède. La faute à qui ?

A ses propres parents bien entendu. Mais à qui d’autre encore ? Eh bien aux parents des parents…

C’est que cette histoire serait transgénérationnelle : dans telle ou telle famille, depuis des générations, passer du temps, causer avec le marmaille, cela ne se fait pas. « Pourquoi faire ? De toute façon ils (les enfants) ne comprennent pas »  m’a-t-on dit en consultation.

Alors a un moment donné, il faut briser la chaine familiale…En général dans la fratrie, il y en a un qui s’y risque une fois adulte. Courageux. Mais il est bien vite montré du doigt car il ne fait pas comme tout le monde, il fait différemment de ce que l’on faisait dans la famille depuis des générations. « Si tu fais plus comme nous, alors t’es plus comme nous » pourrait-on dire. Une trahison familiale en sorte. Il y a comme un mythe (façon de faire, histoire véhiculée par toute la famille) dans la famille qui s’effondre.

Pas plus mal.

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Parce qu’au final, nous les cliniciens, que constate t’on? Eh bien que les gamins ou les adultes les plus en souffrance, ce sont ces enfants qui n’ont pas vraiment l’impression qu’ils étaient aimés étant jeunes. Ce sont des êtres qui ont eu le sentiment d’être presque en trop dans la famille. Y’en a même qui se sont demandé s’ils n’avaient pas été adoptés à la naissance. Ces êtres n’ont pas admiré leurs parents. Au contraire, ils en ont presque la haine.

Ce sont des personne en carence de quelque chose. Un quelque chose qui laisse le cœur avec une plaie, et donc un amour de soi très faible. Or celui qui ne s’aime pas, passe à l’acte à un moment donné: conduites à risques (toxicomanie, alcoolisme ; conduire en excès de vitesse ou sous alcool/drogue sur la route ; rapports sexuels non-protégés…)…Violences diverses contre les autres, contre soi-même (mutilations). Troubles alimentaires (anorexie, boulimie…). Dépression et même suicide…

Chez l’enfant de moins de 12 ans le suicide est très très rare. Mais beaucoup moins rare sont les enfants qui ont pensé au suicide, comme façon d’échapper aux problèmes quotidiens… « Si je m’enfonce un couteau dans le ventre, qu’est-ce que cela ferait »…

« Si je ne suis plus là je ferais souffrir mes parents, bien fait pour eux » ou à l’inverse « ferais-je souffrir mes parents » ?…« Si je ne suis plus là je serais au calme ». Cette façon d’envisager précocement sa propre mort, ne veux pas dire que l’enfant passera à l’acte, mais que plus tard si rien n’est fait, vers l’adolescence par exemple, il pourrait y passer, à l’acte.

C’est fou comme une enfance malmenée peut provoquer tant de souffrances par la suite chez l’individu. Et laisser des traces. La plupart de ceux et celles qui me lisent, le savent bien. Les autres diront que justement de cette enfance, « ils n’en sont pas mort ».

Qu’ils s’interrogent alors sur leur propre vie de couple, sur les relations qu’ils ont avec leurs propres enfants…Peut-être verront-ils qu’en reproduisant ce que leurs parents leurs ont transmis, cela ne les a pas forcément mené vers le bonheur.

Mais il ne s’agit pas non plus de surveiller tout ce qu’on l’on dit ou fait.

Juste de prendre le temps. Le temps de partager un moment avec les gamins à regarder les oiseaux du petit matin, le temps d’une partie de domino, le temps d’une vrai conversation sur les vraies choses de la vie, celles que devant toutes les autres personnes l’on n’évoque jamais, mais qu’il faut pourtant aborder.

Un enfant qui a peur n’osera pas se confier à ses parents. Il aura peur du jugement, peut-être des coups ou encore d’être mis à la rue…Alors plutôt que d’affronter ses problèmes avec père et mère, il les affrontera comme il pourra, c’est-à-dire souvent maladroitement, aggravant encore la situation, faisant alors d’autres rencontres qui vous éloigneront encore plus et qui mettront pour de bon, les distances entre lui et vous.

En somme pour être parent et gagner le respect de son enfant, cela se mérite.

Et cela n’est jamais acquis pour de bon. C’est un travail, de toujours…

Article parue dans le magazine « Belle », supplément du journal « le Quotidien », Ile de la Réunion.

Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion

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