Mon enfant est tombé sur des images porno et me pose des questions

Mon enfant est tombé sur des images porno et me pose des questions

Contrôle parental non-installé sur l’ordinateur, dvd mal cachés par papa, magazines oubliés sous le lit du grand frère….

Le porno est particulièrement consommé par les hommes. Mais il faut dire qu’il l’est maintenant de plus en plus, également par les femmes. Entendons-nous, les femmes ont maintenant des films X « adaptés », moins « directs », plus centrés sur les fantasmes féminins plutôt que sur les fantasmes masculins. Aussi à chacun son porno, d’autant qu’il y a autant de types de films qu’il y a de fantasmes dans l’humanité. Hétérosexuels bien entendu, mais aussi bi-sexuels, homo-sexuels, sado-masochistes, à plusieurs, scatophiles et urophiles, fétichistes, pour n’en citer que les plus courants…Un vrai business le sexe…Il suffit d’ailleurs de faire danser des jeunes -filles en maillot de bain pour vendre une médiocrité musicale. La femme-objet, ça rapporte du pognon.

Bref, les images pornographiques sont une véritable catastrophe psychologique pour l’enfant.

Le mental de l’enfant n’est pas assez mature ; un psychisme doit passer par certaines étapes de croissance pour « encaisser » les événements de vie. Il y a un temps pour chaque chose.

Avant l’adolescence (vers 12 ans), le psychisme de l’enfant n’est pas prêt à voir cela. Et encore, à l’adolescence, certains enfants n’ont pas suffisamment de recul. D’une patiente me racontant qu’16 ans, la vision d’une fellation avec éjaculation dans la bouche, la dégoûté à jamais de cet acte oro-génital, pourtant si prisé par les hommes…Qu’on se rassure, un traumatisme, ça se soigne, même à 40 ans.

Si l’enfant tombe sur les ébats de ses parents, ce n’est pas particulièrement grave, cela arrive très couramment : on en profitera pour lui expliquer la vie. Et ce sera bien moins traumatisant que le porno, dans le sens où papa et maman, s’aiment. Et qu’initialement, c’était caché dans la chambre des parents. L’enfant comprend si l’on prend le temps de lui expliquer, que le sexe est une affaire d’adultes qui s’aiment et qui font cela à l’abris des regards.

Tour le contraire du porno en sommes.

En lui expliquant, cela lui évitera d’échafauder la théorie classique infantile : « les bruits de la chambre des parents, les cris de mamans….C’est sans doute que papa fait mal à maman, dans cette chambre, la nuit »…Et en voyant la scène : « c’est quand papa écrase maman »…

Ne riez-pas, à cet âge vous aviez à peu prêt les mêmes théories : vous aviez-même pensé que le bébé naissait dans les choux, qu’il venait par la cigogne, qu’il sortait des fesses ou par le nombril…Ce n’est pas plus con. Quand on est enfant on cogite avec ce qu’on a (avec ce que les parents veulent bien nous donner comme informations).

Pour revenir au sujet, certaines « victimes » de ces images, pourront avoir l’envie de reproduire ce qu’elles ont vu sans pour autant considérer ce qu’elles font comme « mal » : « si les adultes regardent, ne trouvent pas tout ça dérangeant, c’est que cela est bien ».

Ce n’est pas plus compliqué que cela. C’est aussi pour cette raison, que certains enfants, lorsqu’ils n’ont pas été victimes d’abus sexuels, vont choisir une autre « victime » (consentante ou non) pour reproduire les images vues.

Reproduire quelque chose qu’on a vu, au delà du jeu, c’est maitriser les angoisses qu’on a eu en subissant la vision des actes : en subissant ce qu’il a vu, les images se sont imposées à l’enfant. Il n’était pas préparé à ce qu’il allait voir, il ne pouvait l’imaginer, même un peu. Il tente de (re)prendre le contrôle de ce qui le traumatise. S’il ne le fait pas, les pensées, les images deviennent obsédantes, trop présentes : il faut donc qu’elles sortent de sa tête (pour y revenir de toute façon). Pour cela, il faut les reproduire.

Nul doute que l’enfant qui subira l’acte sexuel d’un autre, sera traumatisé pour les mêmes raisons. La souffrance physique en plus. Comment peut-on penser qu’un coït vaginal pour une petite fille de 10 ans ne se passe pas sans douleurs ?

On le voit, les images porno peuvent avoir des conséquences très importantes sur l’enfant.

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Sur le futur adulte aussi. Un traumatisme, lorsqu’il n’est pas traité (avec un psychologue par exemple), se répète tout seul dans le temps : il revient dans la tête tout le temps, ou à certains moments bien précis, et empêche l’épanouissement. Il bloque, freine, ou pousse à faire des choses interdites…Autant dire que le porno chez l’enfant va marquer le futur adulte, lui qui est censé avoir des rapports sexuels épanouis et satisfaisants.

Je le vois régulièrement avec un bon nombre des couples qui me consultent : il y a une « fâcheuse » tendance à considérer chez certains hommes, que la vie sexuelle c’est le porno. Eh bien c’est vrai et faux. Faux, parce que le sexe conjugal ce n’est pas que de la consommation. Cela doit être une belle part de complicité érotique. Vrai, parce que justement, avec les années, le sexe conjugal, doit idéalement, être meilleur d’année en année et que les fantasmes de chacun, soient-ils plus ou moins « hard », doivent progressivement se réaliser au sein du couple: on ne fait pas toujours l’amour dans un couple qui s’aime; on baise aussi. Mais cela un enfant ne peut le comprendre de lui-même.

Ainsi, bien souvent, les femmes se plaignent que leurs conjoints demandent des choses qu’elles n’ont pas envies, qu’elles trouvent trop « crues »…

Déjà que les femmes n’ont pas les mêmes fantasmes que les hommes, alors là c’est un peu le « bouquet ».

Le problème, c’est que certains hommes considèrent que toutes les femmes, y compris, la leur devrait être « la cochonne » de ces films.

Or, les films ne sont pas la réalité. Ainsi, le couple se retrouve en souffrance. Et c’est une (ré)éducation  conjugale qu’il convient de pratiquer : toutes les femmes n’apprécient pas de se faire éjaculer du jour au lendemain sur le visage. Toutes les femmes n’ont pas le fantasme de s’envoyer en l’air avec une autre femme devant leur mari… Ce n’est pas que ces pratiques doivent ou non être interdites : chacun fait ce qu’il veut avec son conjoint, du moment qu’il ne pratique rien d’interdit (pédophilie par exemple). Il faut cependant que ce conjoint soit non-seulement consentant, mais aussi dans le même « trip » que l’autre. Un fantasme, c’est sur le temps que cela se travaille : par compromis. Un psy n’est pas inutile. Les thérapies conjugales ont tout de même sauvées pas mal de couples.

Si votre enfant vous posent alors des questions sur ce qu’il a vu, il ne faut pas faire la politique de l’autruche : «  ce n’est rien, c’est pas pour toi »…

Ce n’est pas rien. Et pas la peine de l’engueuler pour les questions qu’il pose ; la curiosité est saine et normale. De toute façon les seuls coupables sont les plus grands, ceux qui ont laissé voir, directement ou non. 

Il faut répondre à ses questions le plus naturellement possible. Il faut lui dire que ces films sont des films pour adultes et qu’il n’avait pas le droit d’y avoir accès. Ne pas le culpabiliser non-plus. Il faut lui dire que ce qu’il a vu ce n’est pas la vraie vie, que ce sont des bêtises pour adultes et pas des bêtises pour enfants. Que ce sont des choses que certains adultes font entre eux, mais pas tous et qu’il est interdit aux enfants de le faire.

S’il vous demandent si vous faites « ces choses », dites lui que justement la sexualité des adultes ne concernent que les adultes et pas les enfants. Vous n’avez pas à lui parler de votre sexualité. Dites lui que lui aussi quand il sera adulte, il aura une sexualité et qu’il la fera qu’avec un autre adulte qui sera d’accord pour le faire.

Dans tous les cas, il est essentiel de consulter un psychologue. Et de ne pas trainer.

Je n’ai jamais rencontré un enfant qui ayant vu du porno, en soit resté intact. Jamais.

Article parue dans le magazine « Belle », supplément du journal « le Quotidien », Ile de la Réunion.

Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion

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