Le sexe doit-il être une performance?

Le sexe doit-il être une performance?

Le sexe doit-il être une performance ? Dr GOULOIS David, Psychologue-Sexologue, La Réunion.

Essentielle : Comment envisager le sexe comme une expérience plutôt que comme une performance ?

David GOULOIS : Envisager le sexe comme étant une performance vient de la perception que l’on s’est construite dans sa posture en tant que homme et femme. Ceci est en lien avec l’expérience éducative (ce qui a été transmis par les parents, les famille, la société, la culture dans laquelle on est, à savoir comment doit se comporter un homme et une femme) mais aussi parfois, et ceci d’avantage chez les hommes, par l’influence pornographique qui cultive c’est représentation de « performance sexuelle ».

Aussi, être heureux dans sa sexualité (et j’insiste sur le fait qu’il s’agisse de « sa » sexualité, et non celle des autres), implique parfois un travail de déconstruction et de reconstruction des schémas de pensées, des certitudes, des croyances…

Essentielle : Faire plaisir à l’autre, quelles en sont les limites ?

David GOULOIS : Les limites sont celles que l’on veut se poser et donc que l’on pose à l’autre. Faire plaisir à l’autre ne peut réellement s’envisager qu’en se faisant également plaisir. Car cela se partage. Aussi, il convient toujours de poser le cadre et ce, dès le début de la relation, de ce que l’on aime ou non, de ce que l’on est prêt à accepter ou pas, mais toujours en accord avec ses valeurs du moment, même si ces dernières peuvent toujours évoluer, en fonction de la direction que prend la vie de couple mais aussi en fonction du degré de confiance qu’on accorde à l’autre : ainsi, l’on est plus facilement enclin à accepter de nouvelles pratiques quand l’on se sent psychiquement en sécurité au sein de son couple, élément qui n’est que l’héritage de la complicité que ce dernier aura créé.

Essentielle : Pourquoi être un « bon coup » est devenu si important de nos jours ?

David GOULOIS : Parce que l’on est en dans une société de consommation et de compétition. Ainsi, cela « colle » à l’air du temps : l’on ne veut justement plus perdre de temps et l’on souhaite immédiatement jouir de la vie (ceci, dans tous les sens du terme et donc également sexuellement). L’on est de plus en plus dans une société ou « prendre son temps », accepter les difficultés ou les travers de l’autre, prend moins de sens. En fait la sexualité, depuis l’avènement de la pornographie, qui a commercialisé à grande échelle et véhiculé « ses standards » sexuels, est devenu un produit comme les autres.

Ainsi, l’autre, le partenaire est lui aussi un produit comme les autres, destiné à « ma jouissance ». C’est d’ailleurs, il y a déjà 15 ans environ, ce qu’appelait le psychanalyste Jean-Pierre Lebrun, titre de son livre : « la perversion ordinaire, vivre ensemble sans autrui ». C’est une phénomène de société et lutter contre ce dernier s’avère beaucoup plus compliqué qu’on ne le croit, car il amène l’individu à aller à contre-courant de ce puissant « effet de masse ».

Pour la revue Essentielle, Océan Indien.

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