Je suis triste, j’en envie d’en finir

Je suis triste, j’en envie d’en finir

Vague à l’âme, coup de blues, tristesse…C’est souvent un sentiment qui traverse l’adolescence. Certaine fois ce sentiment est poussé jusqu’à l’extrême : l’idée du suicide et du passage à l’acte.

C’est un sujet difficile, mais qu’il est nécessaire d’aborder : le suicide constitue la deuxième cause de mortalité chez les jeunes de 15 à 19 ans…

Lorsqu’un jeune tente de mettre fin à ses jours, c’est tout l’entourage qui est concerné : famille, amis, camarades, enseignants…

C’est en parlant du suicide, qu’on évitera de plus en plus les passage à l’acte.

Le suicide, hormis les causes psychiatriques (ce qu’on nomme « la crise de folie suicidaire »), est issus d’une escalade de problèmes, qui ont souvent commencé très jeunes, qui se sont accumulés avec les années et qui ont atteint un point de non-retour.

Il faut considérer le passage à l’acte comme un cri du désespoir, de souffrance, une sorte d’appel au secours. Ce que cherche l’ado suicidaire, c’est fuir les problèmes..Il se sent coincé avec tous ses soucis, sa souffrance, ne voit aucune issu de sortie, sauf la mort.

Souvent le suicidaire se perçoit comme mauvais, coupable, incompétent, nul, ne se sent pas aimé… Ce n’est bien évidemment qu’une fausse appréciation de lui-même.

Mais on le sait, nous y sommes tous passé (certains plus tardivement et plus longuement que d’autres), l’adolescence est LA période difficile de la vie.

Période d’ambigüité, d’incertitudes, où l’on souhaite à la fois être grand et rester petit, que nos parents nous fiches la paix, mais aussi qu’ils nous montrent qu’ils nous aiment..

Bref, une période franchement pas simple, pour l’ado mais aussi pour l’entourage.

C’est pendant cette période que l’art des parents consiste à jongler entre « un trop de sévérité », ou « un trop d’amour à la limite de l’étouffement » sur le gamin, et un « pas assez de liberté ».

L’adolescence est un vrai bouleversement à la fois hormonal, mais aussi psychologique, physique…

Sur ce dernier point, l’adolescent est relativement fragile. C’est incroyable comme l’ado est « narcissique » : tout tourne autour du regard qu’on peut porter sur lui, surtout concernant son physique. Il n’hésite pas a être cruel avec ses congénères et à être sensible aux remarques.

Lorsqu’on est ados on est donc fragile émotionnellement.

Même si certains ados se montrent très sur d’eux, ce n’est bien souvent qu’une carapace ; ils sont au contraire très fragiles à l’intérieur, très anxieux, très angoissés.

D’autant que l’ado (regardez avec quelle vitesse il change de goût vestimentaire) ne sais pas qui il est…Il se cherche, dans sa façon d’être, dans son comportement, dans les limites à avoir, se cherche un avenir…Il est paumé le jeune. Et comme il ne sait pas où aller, il va dans les extrêmes. C’est pourquoi l’on voit beaucoup d’ados avec soit un comportement de repli sur eux même, soit un comportement extraverti, dévergondé..

La solution du suicide, qui est une fausse solution, est choisie après avoir essayé tout autre comportement, toute autre façon d’exprimer sa douleur, mais qui n’aura pas été perçu, ou compris..

Alors comment faire face ?

Déjà, il y a des facteurs qui facilitent l’ envie du passage à l’acte chez le jeune. Il s’agit  très souvent d’un climat familial difficile où l’on pourra retrouver :

des problèmes entre parents/enfants, des problèmes conjugaux chez les parents, des abus physiques ou moraux sur les enfants, un climat de violence, l’alcoolisme d’un des parents, l’indifférence du parent à l’égard du jeune, le manque de maturité des parents, une absence de communication, de compréhension, de soutien…Mais il peut il avoir également un dysfonctionnement neuro-psychique: le sujet surdoué (HPI) est d’une fragilité toute naturelle.

Il faut cependant savoir que ce n’est pas un facteur qui provoque l’envie suicidaire, mais un ensemble de facteurs.

Souvent dans les familles, on constatera un excès d’autorité, ou une sorte de relation fusionnelle avec l’enfant, ce qui l’empêche de grandir, de s’épanouir, de prendre son indépendance progressive ; l’ados frustré se sent impuissant à changer ce qu’il n’arrive plus à tolérer. Mais aussi, inversement, on peut constater un manque de présence de la part des parents, une indifférence, des négligences affectives et éducatives.

Dans les cas où il y a eu plusieurs tentatives de suicide dans une famille, l’adolescent peut lui aussi s’y essayer, comme si le suicide était le seul chemin qu’avait trouvé cette famille pour se sortir de problèmes.

Extérieurement à la famille, les chagrins d’amour peuvent faciliter l’émergence d’idées suicidaires chez l’ados ; mais attention, cela ne concerne pas tous les ados qui se sont fait « plaqués » ; sont concernés les ados, qui par manque affectif ou rejetés de leur famille, auront « tout misé » dans cette relation amoureuse et pour qui l’arrêt de cette relation est vécu réellement comme un nouvel abandon.

L’isolement social, le fait d’être rejeté par les camarades doit être pris en compte. Toutefois tous les adolescents suicidaires ne sont pas isolés.

Le souci avec l’ado, c’est qu’il ne demande que rarement de l’aide ; bien que paradoxalement, il la désire tout de même.

Le suicide ne se produit pas sans avertissements.

Il y a des messages directs :   » je serais mieux mort, cela ne vaut plus la peine, vous ne me verrez plus longtemps, j’ai peur de me suicider,  » je vais me tuer, je veux mourir, etc. Ainsi que des comportements auto-mutilants, dangereux.

Et des messages indirects :  » Bientôt je vais avoir la paix, je suis inutile, je le trouve courageux de s’être suicidé, je vais faire un long voyage, vous seriez mieux sans moi, faire des blagues avec le suicide, préparation pour un départ, arrangements finaux, lettres d’adieu. Dons d’objets ayant une valeur personnelle importante. Attrait soudain pour les armes à feu ou produits toxiques…

En termes de symptômes l’on retrouvera :

Des troubles du sommeil, de l’appétit, une grande fatigue ou à l’inverse une agitation, une perte d’envie, de plaisir, de la tristesse, la recherche de la solitude, une irritabilité, une dévalorisation de soi-même, une anxiété. Egalement, le fait de ne plus avoir envie de parler, de communiquer, de voir les autres, une attitude de « je me fiche de tout ». Ou encore, un manque de concentration en cours, une baisse des résultats scolaires, des absences répétées,  un intérêt pour tout ce qui touche à la mort, le paradis ou les enfers, une négligence de son corps, un changement d’accoutrement, une trop grande consommation de drogue, alcool, médicaments. 

Il ne s’agit pas, en tant qu’adulte, de jouer aux « apprentis psy », mais certain de ces symptômes s’ils existent doivent inciter l’adulte à faire consulter l’ado.

Alors comment communiquer avec l’ado suicidaire ?

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Il faut aborder directement la question du suicide. Parler du suicide n’incite pas à passer à l’acte (c’est un mythe), au contraire. Ne rien dire, c’est approuver en silence l’acte suicidaire. Cela permet au jeune d’exprimer ce qui le fait souffrir, de ce qu’il ressent, de la perception de la situation. C’est à ce moment qu’on peut lui faire voir d’autres possibilités que le suicide.

Il faut montrer au jeune, qu’on est disponible pour lui. Mais il ne faut pas juger, ne pas faire la morale ou forcer à la communication. Au contraire vous risquez de le braquer. Il faut lui parler comme à un adulte. Cela ne veut pas dire qu’on le considère comme un adulte, mais juste qu’on ne le considère pas comme un petit enfant. Il ne faut surtout pas penser que la tentative de suicide « c’est juste pour faire l’intéressant ». C’est un appel à l’aide ! Il ne faut pas minimiser les raisons qui poussent au suicide : ce qui n’est rien pour vous, peut être une montagne pour l’autre. Ne le mettez pas au défis de passer à l’acte ! 

Il faudra également écarter le jeune de toute situation qui pourrait être dangereuse : conduite en voiture, en scooter, le laisser seul tant que la situation n’est pas apaisée. Il faut lui ôter de sa disposition, toutes les armes, ou autres objets qu’il pourrait utiliser pour se faire du mal.

Ce qui est très important est de conclure une sorte de « contrat morale » : « tu me promets que tu ne feras rien, que tu ne tenteras pas de te suicider ? Je te fais confiance, j’ai confiance en toi…Appelle-moi dès que tu sens que tu ne vas pas bien. Je crois en toi ». 

Enfin l’emmener consulter un spécialiste (psychologue, psychiatre) ou directement à l’hôpital. Mieux vaut y aller pour rien et se rassurer, que de laisser empirer les choses.

S’il y a hospitalisation, le jeune devra être suivi impérativement psychologiquement.

Sinon, les risques de rechute seront évidentes.

Voici des numéro utiles. Ces associations sont exclusivement des permanences téléphoniques. Elles sont très active et on un rôle essentiel dans la prévention et la prise en charge des conduites suicidaires. Elles sont disponibles 24H/24H, 7jours/7jours.

Des équipes de bénévoles formés seront là pour vous écouter.

SOS Solitude : 02 62 97 00 00

Association Prévention Suicide : 08 00 62 01 62 (numéro vert)

Article publié dans le magazine « Belle », supplément du « Quotidien », Ile de la Réunion.

Dr David GOULOIS : docteur en psychologie, psychologue, psychothérapeute et sexologue sur l’Ile de La Réunion

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